Anne Degand tire sa révérence, avec élégance

Intervention d’Anne Degand, conseillère, lors de la séance du 15 novembre 2018

Depuis 1995, j’ ai passé au sein de cette assemblée des moments passionnants, souvent instructifs, parfois durs qui m’ ont profondément changée et enrichie. J’ ai d’abord été conseillère de l’ opposition puis échevine et enfin conseillère de la majorité. J’ ai fait le tour des 3 positions possibles. Chacune d’elles offre des angles de vue intéressants et de véritables pistes d’ action.

Depuis 1995, j’ en ai vu des évolutions. La plus significative à mes yeux est la représentation des femmes. En 1995, nous étions à peine 10 et le collège était exclusivement masculin. Aujourd’hui, nous sommes 22 et 3 femmes siègent au collège. Demain, elles seront majoritaires au conseil et même au collège, dans un proche avenir ! Je crois qu’elles peuvent, si elles le veulent, transformer de manière significative la politique communale et ses codes.

Je pointerai également le rôle du conseiller de la majorité. En 1995, il n’ intervenait quasi jamais en séance publique. Son travail s’exerçait dans l’ombre comme relais ou sur le terrain. Aujourd’hui, il pose des questions, fait des propositions et va jusqu’ à titiller des échevins. C’est une évolution positive, même s’il faut éviter une certaine surenchère et garder le sens de la loyauté.

Je pars avec le sentiment d’ avoir apporté ma pierre à l’ édifice, d’ avoir contribué à l’essor de Namur, ma ville. Je remercie tous ceux et celles que j’ai pu croiser : hommes et femmes politiques, fonctionnaires communaux et citoyens avec lesquels j’ai noué des relations de confiance et parfois d’ amitié.

Je souhaite bonne chance à la nouvelle assemblée. Le travail ne manque pas et des défis importants sont à relever.

Si vous me le permettez, je voudrais vous partager des passages d’ un texte magnifique de Fred Vargas, archéologue et écrivaine :

 » Nous y sommes.

Nous y voilà, nous y sommes …

Dans le mur, au bord du gouffre, comme seul l’homme sait le faire avec brio, qui ne perçoit la réalité que lorsqu’elle lui fait mal …

Nous avons construit la vie meilleure, nous avons jeté nos pesticides à l’eau, nos fumées dans l’air, nous avons conduit trois voitures, nous avons vidé les mines, nous avons mangé des fraises du bout du monde, nous avons voyagé en tous sens, nous avons éclairé les nuits, acidifié la pluie …

On a réussi des trucs carrément épatants, très difficiles comme faire fondre la banquise, déplacer le Gulf stream, détruire un tiers des espèces vivantes, faire péter l’ atome, enfoncer des déchets radioactifs dans le sol, ni vu ni connu …

Franchement on s’est marrés.

Franchement on a bien profité.

Et on aimerait bien continuer …

Mais nous y sommes.

A la Troisième Révolution.

Qui a ceci de très différent des deux premières qu’ on ne l’ a pas choisie…

On n’a pas le choix, elle a déjà commencé, elle ne nous a pas demandé notre avis. C’est la mère Nature qui l’a décidé, après nous avoir aimablement laissés jouer avec elle depuis des décennies …

Son ultimatum est clair et sans pitié:

Sauvez-moi, ou crevez avec moi.

Evidemment, dit comme ça, on comprend qu’ on n’ a pas le choix…

Il y a du boulot, plus que l’humanité n’ en eut jamais. Nettoyer le ciel, laver l’eau, décrasser la terre, abandonner sa voiture, figer le nucléaire, éteindre en partant, veiller à la paix, trouver des fraises à côté de chez soi, en laisser au voisin, laisser le charbon là où il est, récupérer le crottin…

S’efforcer. Réfléchir, même.

Et être solidaire.

Avec le voisin, avec l’ Europe, avec le monde.

Colossal programme que celui de la Troisième Révolution.

Pas d’échappatoire, allons-y.

A condition que la paix soit là, à condition que nous contenions le retour de la barbarie, une autre des grandes spécialités de l’homme, sa plus aboutie peut-être.

A ce prix, nous réussirons la Troisième Révolution.

A ce prix, nous danserons, autrement sans doute, mais nous danserons encore. »